
Ben si justement.
Un petit tour à Potosi (la ville la plus haute du monde) m’a permis de visiter les fameuses mines d’argent.
Avant de raconter cette aventure, il faut remettre les choses dans leur contexte :
En commençant ce voyage, un super pote (que sa célébrité croissante m’interdit de nommer afin de préserver son anonymat) m’a offert un bouquin « Les veines ouvertes de l’Amériques latine » de Eduardo Galeano. C’est un livre extra ordinaire qui raconte comment, depuis le 15e siècle, les pays européens ont sur exploité les ressources de ce continent sans rien donner en retour et en détruisant peuples, cultures, civilisations et paysages. Ce livre m’a inspiré un profond respect à l’égard des nations indigènes de ce continent. L’un des chapitres de ce livre est entièrement consacré aux mines de Potosi. A l’époque (15e au 18e siècle) Potosi était la principale réserve d’argent (le métal) de la planète. C’était aussi l’une des villes les plus riche du monde et la deuxième plus grande au monde de part sa population.
Aujourd’hui, Potosi à perdu de sa superbe et reflète bien le niveau économique général de la Bolivie, mais certains monuments, bâtiments et places nous font encore entrevoir ce qu’a pu être cette ville en son temps. Mais à Potosi, on vient pour vivre cette expérience inoubliable qu’est la visite des mines encore en activité.
La visite commence par un petit tour au marché des mineurs où l’on fait le plein de cadeaux à offrir durant la visite. Il s’agit principalement de feuilles de coca, utilisées pour supporter les conditions de travail dans cet enfer, d’alcool « potable » à 95° que boivent les mineurs, de cigarettes, et de bâtons de dynamite. Sur ce dernier élément, je me dois de préciser qu’un bâton ne coûte que 2 de nos misérables euros, mais pour les travailleurs c’est une fortune et nos achats sont donc les bienvenus. Ensuite, on s’équipe de bottes, pantalon, veste, casque et lampe frontale avant de partir pour la mine.
Dès l’arrivée, le regard des mineurs (pourtant habitués à voir les visiteurs en tous genres) nous fait bien comprendre la condition de leur travail et nous fait prendre conscience (si jamais ce n’était pas encore fait) du bien être de nos misérables conditions de capitalistes embourgeoisés.
Avant de commencer leur travail, ils passent environ une heure à se fourrer la bouche de feuille de coca, source d’énergie, mais aussi une forme de filtre qui va absorber une maigre partie des poussières de silice et autres éléments respirés tout au long de la journée.
Puis on pénètre dans la mine, dès le début, on a les pieds dans la boue, il fait encore assez froid (n’oublions pas que l’on est à 4200 m d’altitude) et on courbe l’échine pour éviter de se cogner. La toute première étape de cette visite souterraine se fait devant le diable en personne.
Il s’agit en fait d’une tradition, Pachamama (la terre mère) est responsable de la vie sur terre, mais « Tiùù » (le diable mais je ne suis pas sûr de l’orthographe que vous voudrez bien excuser) est responsable de la vie à l’intérieur de la terre (mon explication est un peu simpliste mais elle fait le job). A l’entrée de la mine se trouve donc une statue représentant ledit diable et devant lequel on prend le temps de s’attarder pour ne pas offenser, lui faire une offrande et le prier (en quechua) de nous laisser en paix durant notre visite et pour tout le temps de notre voyage.
Ensuite, on s’enfonce lentement dans les tripes de cette montagne (le Cerro Rico). Au fur et à mesure de notre progression la chaleur se fait de plus en plus pesante (des 15° de l’extérieur, on atteint vite les 40° de l’intérieur), la respiration se fait difficile (à l’essoufflement de l’altitude vient s’ajouter les poussières de silice et autres cristaux présents dans l’air). Quelques explosions, des bruits de marteau piqueur, une poussière qui empêche de voir à plus de 50 cm sot les agréments de notre parcours.
Un premier puits nous permet de descendre le second niveau de la mine, on chemine le dos courbé ou à quatre pattes dans ce labyrinthe de tunnels, un second puits nous permet d’atteindre le troisième niveau (il y en a quatre en tout mais nous n’irons jamais au quatrième tant les conditions sont infernales).
En chemin, on croise les mineurs en pleine action. D’aucun remplissent des brouettes des gravats extraits afin de les convoyer jusqu’aux chariots, d’autres s’évertuent à perforer la roche pour y fourrer la précieuse dynamite, tandis que d’autres s’efforcent de pousser un chariot de 700 kg de gravats jusqu’à la sortie sur des rails qui n’en ont que le nom.
Ces hommes ne semblent pas peiner tant ils sont accoutumés, nous nous faisons le plus petit possibles pour ne pas les gêner dans leur travail. A la pause, ils prennent le temps d’échanger avec vous, mais quelles questions leur poser ? Comment vivre cette honte d’être un touriste au milieu de ces hommes dont la durée de vie excède à peine les 50 ans et qui, depuis l’âge de 14 ans, passent de 8 à 24 heures par jour sans voir le soleil …?
Leur humilité, leur gentillesse et la rudesse de leur travail inspirent le respect le plus profond. Partager une cigarette, un verre d’alcool (au bout d’un verre on est saoul), reste une expérience inoubliable, troublante pour ne pas dire émouvante.
Quelques photos bien sûr dans l’album Bolivie, mais je vous assure que cette visite laissera une trace dans mon esprit à jamais, je ne verrai plus les longues heures passées au bureau de la même façon…et chacun devrait en faire autant !